Le printemps arrive. Nous pouvons déjà le sentir en observant les fleurs qui repoussent et les insectes qui reprennent leur bourdonnement. Le printemps, c’est aussi la fête de Pâques, ses œufs décorés, les chocolats et la chasse aux œufs pour les enfants. Ces derniers grandissent et sont amenés à vous poser des questions sur cette fête du Printemps. Vous vous demandez donc légitimement comment expliquer Pâques aux enfants. Il n’est pas facile de parler de Pâques, surtout à des enfants de moins 12 ans. Avant cet âge, la mort n’est pas si irréversible que pour nous, elle fait partie de la vie. Si nous voulons vraiment parler de la fête de Pâques, il faut bien évoquer la « résurrection », que nous croyions cela possible, ou non. Et il n’est pas facile d’en parler « raisonnablement ».
Pour les tout-petits, Pâques, c’est la fête du printemps, de la nature qui se réveille après le long hiver, la fête du « renouveau ».
Depuis le IVe siècle, l’Église a décidé de fixer la date de Pâques au premier dimanche qui suit la pleine lune de printemps. Pour retrouver la fête de Pâques sur le calendrier de cette année, c’est simple. Trouvez la date de l’équinoxe de printemps sur le calendrier (20 mars). Recherchez la première pleine lune (13 avril). Le dimanche suivant correspond au dimanche de Pâques (20 avril).
Pour évoquer cette force du renouveau, on évoque le lièvre ou le lapin qui, étant la proie de nombreux prédateurs, doit beaucoup se reproduire pour survivre. Dès l’époque romaine, le lapin était un symbole de fertilité. C’est donc tout naturellement qu’il a été utilisé pour exprimer le renouveau de la vie, au début du printemps.
Dans l’Antiquité, Perses, Romains et Égyptiens célébraient le retour du printemps. À l’occasion de l’éclosion de la nature, ils s’offraient des œufs, symbole de fécondité, de création et de renouveau.
Au IVe siècle, l’Église a instauré le carême, temps de « pénitence » pour se préparer à Pâques : (retrouvez notre article sur Carnaval et Mardi-gras). Durant ces quarante jours, la consommation de pâtisserie était interdite, et les œufs non utilisés s’accumulaient. Très tôt, on eut l’idée de les décorer, et de les offrir à Pâques.
Pourquoi est-ce le lapin qui apporte les œufs de Pâques, et pas une poule ? L’image du lapin comme symbole de renouveau étant bien installée, elle a été gardée quand s’est ajouté le symbole des œufs.
À partir du Vendredi Saint, les cloches ne sonnent plus jusqu’au matin de Pâques. Elles sont en deuil pour respecter le souvenir de Jésus mort sur la croix. Une tradition assez récente disait que les cloches partaient à Rome pour être bénies par le pape. À leur retour, elles laissaient tomber des œufs en chocolat ou autres friandises, dans les jardins.
Pour évoquer Pâques avec des enfants de 6/7 ans, nous pouvons raconter des histoires de princesses qui se « réveillent d’un enchantement », comme dans le conte de « La Belle au Bois Dormant » ou même celui de « Blanche-Neige ». Ce sont de vraies images de Pâques.
Les chrétiens disent que l’humanité a été chassée du « paradis », mais « quand les temps seront venus », les humains pourront reprendre leur évolution. C’est ce qui se serait réalisé à Pâques, grâce au sacrifice de Jésus le Christ.
C’est ce que raconte La Belle au Bois Dormant. Elle n’a pas échoué à une épreuve, elle a seulement subi ce que la treizième fée lui a promis. Et « cent ans » signifie un temps assez long… Et quand « le temps est arrivé », le prince n’a même pas à écarter les épines : le chemin s’ouvre devant lui.
On peut aussi évoquer Blanche-Neige. Elle, par contre, échoue aux trois épreuves de son initiation car elle ne sait pas déjouer les sortilèges du peigne, du lacet de corset et de la pomme empoisonnée. Elle n’était pas encore prête.
Après les deux premières épreuves, les nains peuvent arranger les choses. Mais à la troisième épreuve manquée, Blanche-Neige s’endort. Et « quand le temps sera venu », le prince n’aura qu’à la prendre par la main pour la réveiller.
Voici une histoire à raconter aux enfants pour préparer Pâques. Les images symboliques de Pâques s’y retrouvent et permettent ainsi aux enfants d’avoir une vision poétique et amusante de cette fête.
Lapin de Pâques
Marie laure Viriot
Quel beau matin ensoleillé !
Dame Poulette sʼest tôt levée
Pour admirer ce jour nouveau
Qui nʼa jamais semblé si beau.
Pour fêter ça, elle va au champ
Pour picorer, chercher des vers.
Mais ce qu’elle voit est surprenant :
Un œuf brillant sortant de terre !
Vite à la ferme, et en courant,
Trouve Coquette, la poule noire :
— Au champ, là-bas, vite, viens voir !
Et la poule rousse repart devant.
Dans le grand champ, de leurs orteils,
Les poulettes ont bien gratté
Pour dégager un œuf doré
Qui brille en terre comme un soleil.
— À notre coq il faut parler,
Il doit connaître ce grand mystère…
Vite, elles remettent un peu de terre,
Et repartent sans plus tarder.
Mais à qui sont ces belles oreilles
Qui pointent du buisson dʼoseille ?
Ne serait-ce pas Jannot-lapin ?
Il écoute tout, ce grand coquin !
Jannot sʼapproche, regarde bien :
Cʼest un trésor, de ce matin,
Que la terre ne peut pas garder.
Mais comment faire pour lʼemporter ?
Jannot court à son terrier.
« Cʼest un petit lapin
Qui saute, qui saute.
Cʼest un petit lapin
Qui saute plein dʼentrain. »
Vite, il attrape la musette
Quʼun bûcheron a oubliée.
Hop ! Sur son dos, il la jette
Pour rapporter cet œuf doré.
« Cʼest un petit lapin
Qui saute, qui saute.
Cʼest un petit lapin
Qui saute plein dʼentrain.»
Vite, Jannot est revenu,
Pour dégager cet œuf doré.
Au fond du sac, il lʼa caché,
Et aussitôt, a disparu…
Alors reviennent nos deux poulettes,
Et à tue-tête elles caquettent.
Marie laure Viriot
Cʼest quʼelles nʼont pas perdu de temps :
Monsieur Le-Coq suit dignement.
Les deux poulettes ont beau gratter,
Où est passé leur œuf doré ?
Le beau trésor a disparu,
Les deux poulettes sont très déçues…
— Cʼest pour cela quʼon me dérange ?
Sʼécrie le coq qui perd patience !
Monsieur Le-Coq est en colère,
Et sʼen retourne à ses affaires.
Pendant ce temps, à son terrier
Jannot-lapin est arrivé.
Défait le nœud avec grand soin,
Mais dans le sac… il nʼy a rien !
Il prend le sac et le secoue :
Oh ! Tout au fond, il y a un trou !
Quelle tête il fait, Jannot-lapin.
Perdre un trésor, ce nʼest pas rien !
Du sac percé, lʼœuf est tombé,
Et sur les pierres, il sʼest brisé
En des milliers dʼœufs tout dorés
Qui ont roulé, roulé, roulé…
Jannot entend du bruit et voit
Que quelqu’un vient sur le chemin.
Marie laure Viriot
Des enfants crient, sautent de joie :
— Un joli œuf ! Là, encore un !
Tous les œufs d’or sont ramassés.
Les enfants crient : « Merci lapin ! »
Car le Jannot, ce grand coquin,
Nʼa pas voulu rester caché !
Et les enfants lui disent alors :
— Tu sais, Jannot, le grand trésor
Que la terre ne peut pas cacher,
C’est le soleil ressuscité !
Ce n’est qu’à partir de 12 ans, si c’est notre croyance, que nous pouvons parler de Pâques aux enfants.
Un homme peut-il ressusciter ? C’est là le point central du christianisme, et il est évident que cela est du domaine de la foi de chacun. Je voudrais essayer de préciser – un peu – ce que veut dire le mot « ressusciter ».
Dans la mythologie Hypnos et Thanatos sont des frères jumeaux. Ils sont les enfants de Nyx, la nuit. Elle fait régner l’obscurité sur terre. Hypnos est chargé de répandre le sommeil sur toutes les créatures vivantes. Thanatos est le dieux du sommeil dont on ne se réveille jamais.
On peut ainsi comparer le sommeil à une petite mort : lorsque nous nous endormons, notre conscience quitte notre corps. Celui-ci continue à vivre : nous digérons, nos ongles poussent, et si le réveil sonne, nous l’entendons ! Notre corps reste vivant : les forces qui entretiennent la vie de notre corps physique restent attachées à ce corps.
Ces « forces de vie » forment un ensemble structuré que l’on peut comparer à un « corps ». De plus, elles se manifestent aussi sous forme de lumière. C’est pourquoi nous pouvons parler d’un « corps de lumière ».
Au réveil, nous reprenons conscience de nous-même et du monde qui nous entoure.
À la mort, qui est comme « un long sommeil », nous laissons derrière nous un corps sans vie, un cadavre qui va vite se décomposer. Nos forces de vie, notre « corps de lumière » lui, disparaîtra dans les trois jours qui suivront notre décès.
De quoi parlons-nous quand nous parlons de notre « corps physique » ? Selon R. Steiner, notre « corps physique » est une « forme », un « archétype », un « moule » que nous pouvons remplir de deux façons.
Pendant notre vie sur terre, notre corps est rempli de matière : carbone, sels minéraux, eau… Aussi nous parlons de notre « corps matériel ».
Quand nous mourons, nous laissons les matériaux que nous avions empruntés à la terre, mais nous emportons « dans l’autre monde » l’archétype de notre forme humaine.
Croire que Jésus-Christ est ressuscité, c’est croire qu’Il a pu empêcher son « corps de lumière » de se dissoudre au bout de trois jours, et lui a gardé la forme qu’il avait quand il vivifiait son corps physique. Ainsi, il a pu se rendre visible à certaines personnes qui l’ont reconnu car il avait la même « forme », la même apparence. De cette façon, le « ressuscité » a pu se déplacer, parler, manger… C’est ce « corps » rempli de lumière, que l’on appelle le « corps de résurrection ». Et jusqu’à maintenant, seul le Christ, par son sacrifice de pur amour, aurait pu réaliser cette transmutation de la matière en lumière.
C’est bien sûr quelque chose de difficile à concevoir, mais pas si étrange que cela. Le Bouddha ou St François d’Assise, ne devaient pas peser bien lourd le jour de leur mort, vu ce qu’ils mangeaient ! Mais leurs corps rayonnaient d’une grande lumière.
À notre époque, de plus en plus de gens prennent conscience de leur « corps de lumière » et apprennent à s’en servir. Pour nous mettre sur ce chemin, nous pouvons ressentir notre corps physique comme un véhicule, précieux certes, mais auquel nous ne nous identifions pas. Nous pourrons ressentir, alors, que nous existons « indépendamment » de notre corps physique, tout en gardant une conscience normale de nous-même et du monde qui nous entoure. Cela demande de surmonter les forces de notre égo, de développer un autre niveau de conscience, et un amour total pour les autres êtres…
Ne serait-ce pas une façon de commencer à ressusciter ?
Joyeuses Pâques !
Retrouvez chaque trimestre des histoires douces et empreintes de poésie à raconter aux enfants de 3 à 10 ans dans notre magazine Fanette et Filipin.
Roger Gandon, né en 1944, est eurythmiste, pédagogue et conteur. Il écrit des contes pour les enfants et les adultes. Il participe à la rédaction du magazine Fanette et Filipin.
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